San Jose, le 18 juin 2001

Gun Pride et Gay Show

Veni, vedi, vici, et aussi dépensi 8 dollars pour le Gun Show qui prit place dans la bonne commune de San José, CA les 9 et 1O juin derniers. 8 dollars, bande de rapaces ! Le même jour, dans la même ville, eut également lieu un meeting des Conservateurs Compassionnés (exquis, n'est-ce-pas ?). Cette charmante congrégation se compose pour l'essentiel de réactionnaires qui, depuis que les Russes ont révélé leur vrai visage de petites tarlouzes inoffensives, militent en faveur d'un bouclier de satellites bourrés de missiles pointés sur Pékin. Les Chinetoques n'ont plus qu'à bien se tenir et à consommer des produits américains pour améliorer leur ordinaire.

Revenons à nos flingues. Un véritable arsenal s'offre aux yeux du visiteur ébahi : revolvers lourds et brillants à la Dirty Harry (j'en ai pris un en main, c'était hyper jouissif), petits pistolets adaptés à la taille du sac à main (pratique pour les femmes paranos), fusils à pompe de flic, dont les balles laissent un gros trou d'aération dans le ventre du canardé, couteaux de Rambo, etc. Il est même possible de se procurer à prix d’ami des mitrailleuses lourdes sur trépied. Un engin de ce genre négligemment posé à proximité de la niche du doberman rehausse avantageusement l’aspect d’ensemble de tout un jardin de banlieue un rien tristounet.

La foule est essentiellement composée d'hommes, parfois accompagnés de leurs femme et enfants. Certains exposants présentent de très belles pièces. Il faut le reconnaître, ça en deviendrait troublant, un beau flingue. Le badaud mâle se sent irrésistiblement attiré par ce bel objet, intéressant à étudier d'un point de vue technique et dont le pouvoir d’attraction s’apparente à celui d’une belle voiture. Et puis, l'objet, une fois en main, est comme un gros zizi, qu'on brandit à la ronde, histoire d'affirmer sa puissance face aux autres. Pour un peu, on se mettrait à faire pipi par terre afin de délimiter son territoire. ARRRH, CA M'EXCITE ! Mais bon, reposons la pétoire sur la table et dirigeons-nous vers le petit stand d’à côté tenu par un exposant libraire...

Le choix en matière de littérature est, disons-le, éclectique. Je feuillette un petit manuel très bien fait, qui explique comment fabriquer des bombes artisanales avec deux paquets de macaronis et quelques bananes mûres (à ce propos, j'ai vu aussi dans un autre bouquin que les peaux de bananes séchées, puis mises en poudre ont des propriétés hallucinogènes. Il est cependant écrit que les effets de la banane ne commencent à pointer le bout de leur nez qu'au bout du quatrième pétard banané...). Je trouve aussi un excellent ouvrage signé par Henry Ford, le roi de la bagnole en son temps, un grand humaniste qui aimait son prochain de tout son cœur, enfin à condition qu'il ne fût pas juif. Ah ça, les Juifs, le Riton les aimait pas. Ou plutôt si, il les aimait bien, ce sont des bonnes gens, n'est-ce-pas ? Et Riton a des bonnes manières, il n'a pas d'a priori. Cependant, suite à une observation minutieuse et objective des faits et gestes des Juifs pris dans leur ensemble, il nous démontre brillamment par " a plus b " que l'engeance youpine travaille à la perte de l’Occident Eternel. Je vois d'autres livres sur le même thème, dévoilant en toute " objectivité ", à coup de raisonnements pseudo-scientifiques limpides comme un verre de Ricard, la véritable mission de la juiverie mondialiste. A ma disposition se trouve enfin tout un choix de livres relatant les mensonges quotidiens du gouvernement de Washington, qui n'a de cesse d'ourdir des complots destinés à favoriser l'entrée des chars russes, euh non, chinois désormais (il va falloir mettre à jour les éditions) dans une Amérique livrée, nue, à ces sales rapaces communistes. Cela dit, depuis que l'autre barjot a pris le fauteuil de Président des Etats-Unis, je suppose que la nation est revenue sur le droit chemin. Finis les coups mesquins avec Bush Jr. Ceux-ci ont laissé place à des retours d'ascenseur bien bourrins, bien lisibles par tous, en faveur des fabricants d'armes et des exploitants pétroliers qui ont soutenu Georgio l’intello à coup de millions de dollars.

Et bien, voilà, je termine, en compagnie de mon pote/collègue de bureau Mehmet le Turc d'Alsace, mon petit tour du Gun Show, en jetant un coup d'œil à quelques vieilleries (photos, briquets, boucles de ceinturon, etc.) vendues par une sorte d'antiquaire. Je n'ai même pas pu prendre de photos. Un gros type à l'allure de charcutier (pas la version sympa et bonhomme du vendeur de jambon, l'autre version, beaucoup plus agressive, au regard froid) m'a dit, alors que je pénétrai dans la salle d'exposition, que les photos sont interdites à l'intérieur du bâtiment. Je récupère un dernier petit papier distribué par des membres de la NRA (National Rifle Association), qui invite les électeurs amis des flingues à se rassembler pour faire pression contre des propositions de loi anti-armes à feu.

* * *

Le lendemain, virée avec Elisabeth et Madeleine à San José. Nous allons voir les pédés et les lesbiennes parader, à l'occasion de la Gay Pride, le long de l'avenue principale de la ville !

Le défilé ne s'avère pas bien long. Rien à voir avec l'exubérance des chars parisiens. Nous assistons à une fête sage, au volume sonore modéré. Le maire, Ron Gonzales, marche entre deux cortèges d'associations locales. Il nous fait un signe de la main. En tout cas, c'est pas un pédé, lui. A ses côtés déambule une petite brunette pas mal du tout, qui tient dans ses mains une pancarte " Ron Gonzales ". Peut-être s'agit-il de la minette qu'il a choisie l'an dernier pour remplacer sa femme vieillissante (tout en suscitant infiniment moins de scandales que Clinton, car Ronnie n'a pas joué au jeu du menteur avec les médias et son entourage). Nous voyons passer devant nos yeux émerveillés les jolis membres (bien bronzés) de l'association Homosexuelle Californienne de Rodéo. Yep, mister, vous ne rêvez pas, des pédés à cheval, qui font des cabrioles sur leur monture (je sens mon style s'envoler, là) en criant " Yeeehaaa ! " comme dans les westerns avec John Wayne. Ils organisent un grand rodéo à la fin du mois à San José. Peut-être irons-nous, ça doit valoir son pesant de cacahuètes.

Représentants de la Golden State Gay Rodeo Association (infos disponibles à http://www.gsgra.org)

Une chose m'attriste : le manque de participation du public, coupé de la chaussée par des barrières métalliques. Du coup, la foule assiste au spectacle sans vraiment se fondre totalement à la fête... Le chef fonctionnaire responsable de l'établissement de barrières devant les trottoirs est probablement un crétin parano abreuvé de journaux télé alarmistes et débiles. Mettre des obstacles de ce genre revient à cloisonner le public et à lui donner un rôle passif désagréable. C'est de l'anti-démocratie, aux armes, compagnons de France, on va leur montrer ce que c'est, que de foutre le bordel !

Bon, je m'emporte là (bien que ce soit grave et important, cette histoire de barrières, je pourrais en tartiner des pages sur le déni de démocratie participative, sur Guy Debord, les punks, le mouvement des rave parties, tout ça, c'est connecté). Une fois le défilé terminé, tout le monde se rend dans un parc proche du centre-ville où se déroule un petit festival sympathique célébrant l'événement de la Gay Pride. Nous suivons la foule un certain temps, afin de nous rendre dans un autre parc où nous pourrons nous consacrer au repas de Madeleine. Devant le portail d'accès aux festivités se passe un spectacle qui pique notre curiosité. Un type (que j'avais repéré plus tôt déjà, en marge du défilé) brandit une pancarte intéressante. Sur le côté pile est inscrit : " TURN TO JESUS OR BURN IN HELL ". Sur l'autre, une citation du genre : " Revenez à Jésus, mes pauvres agneaux perdus " (il s'agit en fait d'une citation de la Bible dont j'ai oublié le contenu exact). Il beugle dans un haut-parleur : " Homosexuals, come back to Jesus. It is not too late. Repent and come back to the right path or you'll burn in hell ! " Yeeehaaa (comme diraient les types de l'association homosexuelle de rodéo), un véritable " Jesus freak ", un gros taré de la Bible qui veut remettre toutes ces tarlouzes dans le droit chemin ! Only in the US, baby. Je suis bien content d'être en Californie, il va y avoir de l'action.

La pancarte qui fâche

Bien évidemment, les altercations vont bon train entre le Saint Homme et des virulents défenseurs de la cause pédéraste. Il y a même un groupe religieux homosexuel qui chante des bondieuseries juste à côté de l'autre Ayatollah, sur le thème : " Dieu aime tout le monde, quel que soit son penchant en matière d'amour et de fesses. " J'assiste émerveillé au spectacle gratuit. L'autre Khomeyni nous repère avec Madeleine et beugle dans son haut-parleur : " Go away, you and your baby. This is not a right place for a baby ". Je lui dis d'aller se faire foutre avec sa religion à la con. Je suis français, moi, monsieur, alors la religion, j'en n'ai rien à foutre, on s'en est débarrassé il y a plus d'un siècle et tout le monde s'en porte bien mieux. Et puis, de quoi tu te mêles, gros con, ça te regarde pas. Raaaah putain, je le savais bien, j'aurais dû l'acheter le gros flingue à la Dirty Harry, je t'aurais fait sauter le caisson avec, gros débile.

En fait, je ne dis rien du tout (c’est un gros costaud plus grand que moi, l’autre). Et je passe devant lui avec la poussette. Ce couillon nous bloquait le passage pour le parc où désirions nous rendre.

Adresse : pierre_gilet@hp.com

Oh please, drive me back home.